Chic Tattoo, de point en aiguille
« Quand une porte se ferme, tu trouves une façon de passer par la fenêtre ».
La conclusion de mon entrevue avec Stéphane Chiquette, propriétaire de Chic Tattoo, au sujet de la réception du prix L’audacieux de la chambre de commerce et d’industrie de Dolbeau-Mistassini en novembre dernier, méritait l’en-tête. Notre discussion met en lumière un entrepreneur brillant, authentique, résilient, qu’on a tout intérêt à découvrir si ce n’est encore fait.
Artiste dans l’âme, son talent à l’aiguille n’est pas à démontrer – mais si vous ne le connaissez pas encore, passez voir son portfolio sur sa page Facebook ou sur Instagram. Pour les intéressés, l’entreprise est aussi présente sur TikTok, YouTube et Telegram.
Un tatoueur d’avant-garde
Il semblerait que Stéphane n’a jamais cessé d’être en mode solution depuis ses humbles débuts dans le monde du tatouage, en 2013. Si plusieurs années ont passé avant qu’il assume pleinement son titre de tatoueur professionnel, aujourd’hui, son expérience est reconnue et sa clientèle est internationale. Comme entrepreneur, son instinct pour trouver les tendances et sa volonté d’être toujours en avance sur le marché en ont fait le candidat idéal pour le prix susmentionné.
Après avoir écrit deux recueils d’information sur le tatouage, Stéphane a tourné une série de vidéos YouTube pour montrer à ses clients sa méthode pour atteindre les buts qu’il se fixe. Dans celle-ci, on le suit dans la création et la mise en marché d’un nouveau produit pour sa clientèle, un savon doux spécialement conçu pour la cicatrisation des tatouages, le premier dans son genre au Québec. « Comme tatoueur, tout ce qu’on faisait, c’est donner le bon vieux conseil à nos clients de se laver avec un savon doux, hydratant, antibactérien. Je me suis dit qu’on pourrait faire mieux que ça ». Et il l’a fait.
Améliorer la formation pour les tatoueurs
Depuis quelques années, Stéphane s’est tourné vers la formation en ligne. Le projet Chic Tattoo Académie, qui lui a valu le prix L’audacieux, vise à bâtir un institut didactique où les tatoueurs débutants comme les plus expérimentés pourront trouver de l’information, de la documentation et de la formation continue. L’académie du tatouage est née, entre autres, de l’absence de formation structurée pour le tatouage dans la francophonie au moment de la conception du projet. Entièrement en ligne, ça n’existait tout simplement pas. Inspiré de son parcours et de celui de beaucoup de tatoueurs autodidactes ou formés « sur le tas » par d’autres tatoueurs, il a voulu améliorer les conditions d’apprentissage du métier et vise un public international. L’attention qu’il porte à ses étudiants présents comme futurs est digne de mention. Tous les détails comptent, surtout en ce qui a trait à la gestion d’une entreprise de tatouage, un volet souvent ignoré au profit d’enseignements de techniques artistiques plus avancées dans d’autres types de formations. Pourtant, explique Stéphane, « s’il y a quelque chose qu’il est impossible de vendre, c’est le talent. Si tu as le talent, passer des heures en formation pour diversifier ses techniques, c’est beau, mais si tu n’apprends pas comment gérer l’entreprise, ça n’ira nulle part ». Pour aider ses étudiants, Stéphane prévoit entre autres la création de communautés en ligne, du mentorat et des groupes privés.
La création d’un institut crédible a le potentiel de révolutionner les normes de ce marché en plein essor, mais encore trop souvent perçu comme crapuleux. On s’éloigne des histoires d’aiguilles mal désinfectées dans le sous-sol du cousin de l’ami d’un coloc’ de cégep.
L’entreprise de tatouage comme modèle d’audace
S’il faut déjà une bonne dose de cran pour se lancer en affaires, il en faut sans doute davantage dans un milieu non conventionnel comme le tatouage. Le prix lui-même, s’il a une valeur positive de reconnaissance du milieu des affaires pour Stéphane, sert surtout d’encouragement aux entrepreneurs débutants. Il le reçoit comme une leçon à tirer de son expérience : « se faire dire non en affaires, surtout quand on a de l’ambition, ça arrive très souvent. Encore plus quand un projet est difficile à faire rentrer dans des petites cases de formulaire ou fait partie d’un milieu non traditionnel, comme celui du tatouage. Ça ne veut pas dire que le projet ne peut pas marcher. Mais il faut être créatif ».
Pour lui, c’est une occasion de trouver une façon de faire à laquelle personne n’a encore pensé. C’est là que naît l’audace. C’est là qu’on passe par les fenêtres.